“Wokisme” et dictature de gauche ou étroitesse d’esprit ?

Martin Luther King a inventé le mot "woke"
Martin Luther King a inventé le mot “woke”

Samedi 28 janvier, l’UDC, par l’intermédiaire de Céline Amaudruz, a lancé sa guerre sainte contre le
« wokisme » et la « dictature de la gauche », termes employés entre autres dans un article paru dans le journal Le Temps du même jour.

Le mot « woke » fut utilisé pour la première fois par le pasteur Martin Luther King, littéralement pour éveiller la population au combat des minorités

Pour le Larousse, le « wokisme » est une « idéologie d’inspiration woke, centrée sur les questions d’égalité, de justice et de défense des minorités… ». Le mot « woke » fut utilisé pour la première fois par le pasteur Martin Luther King, littéralement pour éveiller la population au combat des minorités, notamment noire aux États-Unis.

La vice-présidente du parti d’extrême droite aurait certes été victime d’une tentative d’entartage lors d’une prise de parole à l’Université de Genève, agora qui a également vu en 2022 deux conférences empêchées par des militantes et militants jugeant, non sans raisons fondées, les écrits des intervenants et intervenantes toxiques pour les droits des personnes discriminées.

Ces cas extrêmes sont à dénoncer parce qu’antidémocratiques, mais de là a les transformer en programme politique visant à combattre celles et ceux qui cherchent simplement à avoir les mêmes chances et opportunités que la majorité est une aberration qui ressemble beaucoup au discours de haine envers l’occident, et sa soi-disant décadence, que l’on entend tous les jours du côté de Moscou actuellement. C’est d’autant plus choquant venant d’un parti qui doit lui-même parfois faire de l’ordre dans les dérives extrémistes de membres ou de sympathisants.

L’UDC entend matérialiser sa guerre contre « la dictature de gauche », d’une part en livrant bataille aux bureaux de l’égalité à tous les niveaux, et de l’autre en empêchant autant que possible l’utilisation du langage inclusif.

Agir pour soutenir l’idée que le mariage est l’union de deux êtres qui s’aiment, c’est œuvrer pour plus d’égalité

Les bureaux de l’égalité ont vu s’élargir leurs domaines d’intervention à bien plus que l’application de la loi fédérale sur l’égalité ou les violences faites aux femmes, bien que cela reste hélas ! un sujet essentiel, grâce aux travaux scientifiques démontrant régulièrement que toutes les minorités sont discriminées dans leur accès au marché du travail, à la santé et plus généralement aux droits dont jouit la majorité. Agir, par exemple pour soutenir l’idée que le mariage est l’union de deux êtres qui s’aiment, c’est œuvrer pour plus d’égalité et non moins comme le laisse entendre l’UDC.

De nombreuses études universitaires prouvent également l’importance du langage dans la construction des stéréotypes de genre qui aboutissent essentiellement à la discrimination des femmes. Le langage inclusif, qui n’est pas qu’affaire de points médians, vise à corriger la règle du masculin générique imposée par l’Académie française au XVIIe siècle au prétexte que « Le genre masculin, étant le plus noble, doit prédominer toutes les fois que le masculin et le féminin se trouvent ensemble. » (Claude Favre de Vaugelas, Remarques sur la langue française, 1647).

Tout comme la lutte contre le dérèglement climatique se base depuis 50 ans sur des faits scientifiques remettant en cause nos certitudes, celle en faveur du droit des minorités et des femmes est fondée sur des faits indiscutables qui bousculent nos préjugés.

S’engager en faveur de ces deux questions si importantes pour notre avenir n’est pas synonyme de « dictature », mais d’ouverture vers un futur dans lequel l’être humain sous toutes ses facettes a toute sa place. Pour cette raison, ce texte est écrit en langage épicène.

Lynn Bertholet, candidate des Vert·e·s au Grand conseil genevois et au Conseil national.

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Lynn Bertholet

Banquière, activiste pour la Diversité et l’Inclusion, fondatrice et présidente d’ÉPICÈNE, association d’utilité publique en faveur des personnes transgenres, Lynn Bertholet a étudié à HEC Lausanne, à l’IMD et à la Graduate Business School de Stanford. En 2015, elle a été la première femme transgenre à Genève à obtenir de nouveaux papiers d’identité avant même d’avoir subi une opération chirurgicale.

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